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Imago Dalmatiae. Itinerari di viaggio dal Medioevo al Novecento

Castelnuovo

“Tout de suite, à l’ouverture de la première des trois baies, l’on aperçoit Castelnuovo, étagée dans la verdure d’une colline et flanquée du fort Spagnuolo qui se cramponne à la cime d’un roc escarpé. Nous y passâmes la nuit (Raguse-Castelnuovo: 48 kilomètres. Assez bonne route, à part de redoutables empierrements dans la Sutorina).

L’hôtel Bella-Vista ne ment point à son nom: juché au sommet de la petite ville, on y jouit d’une vue étendue sur le commencement des Bouches. Mais il est plus que modeste. De grosses punaises étaient, avec nous, les seuls hôtes de cette nuitée. Les chambres se trouvent dans une maison noire située au milieu d’une ruelle où flottent des parfums douteux et où, du soir jusqu’au matin, des Slaves chantent de tristes et monocordes complaintes. La salle à manger est sur la place qui forme le sommet de la ville pointue. Dans ce pays de beau temps l’on mange presque toujours en plein air: la placette était couverte de petites tables que garnissaient des officiers autrichiens; nous dînâmes au milieu d’eux, sous la voûte du ciel parsemé d’étoiles, et aux accords d’une musique qui jouait douloureusement faux. 

La petite ville est, sur sa colline, derrière de vieilles murailles médiévales. On y pénètre par un escalier, oui, un escalier, sous une étroite porte qui perce le mur au-dessous d’une tourelle. Seuls les humains, et les bourriquots, ont accès dans cette ville d’escaliers. Les ânes montent et descendent gaillardement les marches glissantes avec leurs lourds chargements. On dirait une ville africaine. On concevra sans peine que l’auto ne put parvenir jusqu’à l’hôtel: nous dûmes la laisser coucher à la belle étoile dans une des rues du faubourg qui descend vers la mer.

L’aspect de cette ville qui fut redoutablement fortifiée au moyen âge, sa position forte par elle-même, sa situation devant l’entrée des Bouches de Cattaro, suffisent à faire pressentir qu’elle dut jouer un rôle stratégique important. […]. Ses habitants sont de moins en moins Italiens, de plus en plus Slaves: ils appartiennent à peu près tous à la religion grecque orthodoxe; c’est une population de marins, ils ont parcouru toutes les mers et baragouinent toutes les langues” (pp. 179-180).